mercredi 11 juillet 2007

Carte postale de l'Amérique profonde / le lynchage des Noirs aux Etats-Unis





La ségregation et le lynchage des noirs (Carte postale des Etats-Unis)







Le « lynchage », tout le monde, ou presque, sait ce que cela signifie. Peu, en revanche, savent que ce terme vient de William Lynch (1736-1796), juge de paix en Virginie, qui "réforma" la Justice pour la rendre plus... « efficace » et qu'il n'apparut vraiment qu'en 1837 quand la "justice" selon Lynch commença à être appliquée aux Indiens de Nouvelle Angleterre avant d'être généralisée aux Noirs du Sud des États-Unis.






Les clichés que vous allez voir sont ceux d'une Amérique obsédée par ses nègres (n'oublions pas que l'Amérique n'a fait qu'hériter de cette obsession appartenant à ses ancêtres européens).



Certaines de ces « cartes postales » sont tirées de l'exposition « Sans sépulture » présentée en juillet 2000 à la New York Historical Society. Ces clichés non si archaïques confrontent les Etats-Unis avec une page sombre de leur histoire et me font poser les questions suivantes: Comment une nation a pu tomber si bas ? Comment les nouvelles générations d'américains ont pu grandir avec un tel fardeau culturel? Comment peut-on pardonner?



Ces images de lynchage proviennent des greniers de l'Amérique profonde et de ses albums de famille, archivées et sauvegardées tel des exploits, des titres honorifiques. Ces corps exhibés, suppliciés, fouettés, écorchés, lacérés, mutilés, brûlés vifs sont ceux de jeunes noirs en générale et rarement a-t-on réussi à savoir pour quel délit, à part celui d'être nés dans une terre de frustration blanche et si loin de leurs terres d'origine. La foule est toujours présente, posant, radieuse ou indifférente, aux pieds des pendus, satisfaite du devoir accompli. Chasseurs à visage découvert, sûrs de leur impunité. Complicité des photographes, alertés par la rumeur ou la presse, qui installaient leur chambre noire sur les lieux mêmes de l'exécution pour procéder rapidement aux tirages. « Voici notre barbecue d'hier soir », écrit un dénommé Joe à ses parents, au dos d'une de ces cartes montrant les restes calcinés d'un pendu de dix-sept ans à Robinson, Texas, en mai 1916. Le fils attentionné a même pris soin de signaler sa présence au sein de la foule par « une croix sur la gauche du gibet».






«Des atrocités au nom du maintien d'un ordre social et racial et de la pureté de la race anglo-saxonne».




C'est donc au nom de la race blanche, de la femme blanche guettée par les appétits débridés des Noirs, que l'on mutile et que l'on tue. La tradition sudiste tend à lier le lynchage aux meurtres et viols de femmes blanches. En réalité, on lynchait aussi bien les femmes (61 entre 1889 et 1918) et les enfants, comme en témoigne la photo de Laura Nelson, pendue en 1911 à un pont de l'Oklahoma avec son fils de quatorze ans dont elle avait pris la défense. Il ne suffisait bien souvent que d'avoir offensé la suprématie blanche: une dispute, des insultes, un témoignage à charge contre un Blanc, pouvait conduire à la potence. Tel Rufus Moncrief, torturé puis pendu à un arbre avec son chien pour avoir refusé de se découvrir devant un Blanc.















L'écrivain Hilton Als nous raconte :


"Dans ma vie de citadin, j'ai tellement souvent changé de trottoir, la nuit, pour ne pas effrayer la femme blanche qui venait en face... Tellement de précautions prises pour ne pas effrayer les Blancs par ma simple existence..."


Droit pénal et lynchages
Malgré l'arrêt de la Cour suprême dans Strauder v. West Virginia de 1880, qui interdisait l'exclusion des Noirs américains des jurys populaires, ceux-ci étaient systématiquement écartés de ces fonctions. Ils étaient par conséquent laissé à la merci du système judiciaire blanc.







Dans certains États, tel l'Alabama, l'État utilisait le système pénal afin de rétablir une sorte de servage, en condamnant les hommes noirs à des années d'emprisonnement, durant lesquels ils travaillaient gratuitement pour des employeurs privés tels que la Tennessee Coal, Iron and Railroad Company, une filiale de la United States Steel Corporation, qui payait l'État en échange de leur travail forcé. Les punitions imposées hors du système judiciaire étaient encore plus brutales. Des milliers de Noirs ont été victimes du lynchage par des Blancs s'auto-proclamant "justiciers", parfois avec l'aide explicite de responsables officiels, dans les États du Sud et au-delà. Ces lynchages se transformaient parfois en véritables pogroms, ainsi lors des émeutes raciales d'Elaine en 1919 ou des émeutes raciales de Tulsa en 1921. Les coupables de telles exactions se sentaient à ce point à l'abri de toute poursuite judiciaire qu'ils prenaient souvent des photographies de leurs victimes, et en faisaient des cartes postales.




Le Ku Klux Klan, qui avait à peu près disparu après une apparition brève mais brutale au début de la Reconstruction, se reforma en 1915, en partie sous l'influence du film de David Griffith, Birth of a Nation, qui exaltait le premier Klan. Ils combinaient la rhétorique raciste à la xénophobie envers les immigrants, l'antisémitisme, l'anti-Catholicisme et l'anti-syndicalisme. À ces discours violents, ils ont ajouté l'usage systématique du lynchage et de mises en scènes spectaculaires (croix incendiées dans les quartiers noirs, etc.) visant à instaurer un véritable climat de terreur sur la population noire. Le lynchage de Thomas Shipp et d'Abram Smith, en 1930 dans l'Indiana, inspira la chanson Strange Fruit composée par Abel Meeropol (sous pseudonyme), un artiste et sympathisant communiste qui adopta les enfants des époux Rosenberg après leur exécution en 1953. Reprise par l'Afro-américaine Billie Holiday en 1939 à New York, la chanson, qui constituait un réquisitoire émouvant contre les multiples cas de lynchage dans le Sud, devint un hit populaire pendant la Seconde Guerre mondiale (voir article sur "strange Fruit).



Qu'il y ait eu procès ou pas ne changeait rien à l'affaire. D'une part, parce qu'il s'agissait généralement de parodies de justice où l'accusé, condamné d'avance, comparaissait devant un jury blanc. D'autre part, parce que la foule, peu soucieuse des sentences rendues par le tribunal - quand elle ne les devançait pas -, entendait se faire justice elle-même, n'hésitant pas à tirer le prisonnier de sa cellule, souvent sous l'oeil complice du shérif. Dans certaines villes du Texas, les représentants de la loi ont livré des noirs à la foule. Le maire a donné une journée libre aux écoliers et les Chemins de fer ont organisé l'excursion pour que le peuple puisse voir un être humain brûlé vif, témoigne en 1900 l'activiste Ida B. Wells, partie en croisade contre « la loi sans nom ». Une étude effectuée en 1933 sur cent lynchages de Noirs a établi qu'un tiers des victimes étaient innocentes des faits qui leur étaient imputés. Et que, dans la moitié des cas, la police avait activement participé à l'exécution.




L'Occident, une grande culture de négriers et esclavagistes a avancé au cours des siècles les théories les plus racistes, les méthodes d'aliénation et de destruction de l'humanité à grande échelle, les lois les plus honteuses à l'égard de la différence et de l'autre, des mécanismes de réflexion nombrilistes et dictateurs.




Qui croit que le cauchemar infligé aux noirs est fini ? Il est dans nos mains Noirs d'aujourd'hui et de demain de nous assurer que ces épisodes ne se répètent pas. Aussi intégrés que nous soyons dans cette société, il y a très peu de choses qui ont changé en profondeur. Restez vigilants et manifestez vous car « une pierre ne devient pas éponge en un siècle.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Je suis méconnaissable, ils ont fait de moi un monstre, un barbare, une corde aux longs cous brisés, un océan de sang glacé.
Je suis La honte de mon espèce, l'ignominieuse, la pernicieuse mise à sac de mon humanité,
De mon berceau africain d'ou le vent me berce, d'ou coule l'eau de la vie, d'ou le feu jaillit et dont la terre se nourrit, je me demande pourquoi tant de haine au monde, tant de continents souillés ?
L'humanité est morte pour moi ce jour la, au dessus des morts pendus aux arbres,
Si elle ne veut pas mourrir avec moi elle ne devra pas oublier, parce que je la penderai à mon cou trop irrigué par mes sentiments douloureux qui ont traversés les siecles dans l'ignorance.
je suis méconnaissable, ils ont fait de moi un monstre, un barbare, une corde aux longs cous brisés, un océan de terreur bouillonnante.
le fruit défendu.